La reproduction de la vigne
Reproduction de la vigne

La reproduction de la vigne

Le sexe et la génétique de la vigne

La vigne a une stabilité génétique disons… variable.La plupart des cépages que nous connaissons bien de nos jours en France (et ailleurs) sont des métis, issus de croisements entre deux parents de la même espèce, vitis vinifera. Ces croisements se sont produits à des moments différents, et il n’est pas toujours évident de déterminer avec précision ni où, ni quand ils ont eu lieu. Quelques exemples ?

  • Syrah (dureza x mondeuse blanche) : identifié sous le nom de serine ou des synonymes proches au XVIII ème siècle, mais en existence très certainement depuis plus longtemps
  • Cabernet Sauvignon (cabernet franc x sauvignon blanc) : connu à Bordeaux depuis le milieu du XVIII ème siècle
  • Merlot (cabernet franc x madeleine noire des Charentes) : identifié pour la première fois dans le Jardin de Luxembourg en 1789

Il faut savoir qu’avant les XVIII ème et XIX ème siècles et les avancées en agronomie, on ne cherchait pas souvent à identifier les variétés de vigne, qui étaient certainement assez différentes, et bien plus nombreuses, région par région. C’est pour cela que les rigidités des appellations et de l’INAO en matière de limitation de variétés me font un peu sourire, car elles sont fondées sur une vision statique et à très court terme (en gros, depuis le phylloxera) de l’histoire des vignobles. Mais nous ne sommes qu’au début des découvertes en matière des origines des variétés de vigne, car le séquençage de son génome ne date que de 2007. Il est le fruit du travail d’une équipe mixte, franco-italienne. Je rappelle que la vigne a été la 4ème plante dont le séquençage génétique a été réalisé.

Le séquençage du génome de la vigne est une avancée majeure dans le domaine de la recherche qui ouvre beaucoup de perspectives, notamment en matière d’amélioration variétale et de connaissance des fonctions précises des gènes, outre la possibilité d’identifier les origines biologiques d’un nombre de variétés qui va aller en croissant. Par exemple, l’amélioration des capacités de la vigne à résister à des maladies sans avoir à recourir à des traitements chimiques dans le vignoble.

Ce sont les connaissances acquises avec ce travail de séquençage qui vont permettre au chercheurs de mieux cibler leurs recherches et de mieux adopter porte-greffes et greffons aux modifications climatiques (périodes plus chaudes et sèches, par exemple), à une exigence qualitative croissante (taille et maturation de baies, par exemple), et, bien sûr, développer leur  résistance à des virus ou à des maladies.

La sélection des pieds de vigne

Depuis le début de l’exploitation de la vigne par l’homme, celui-ci a tenté d’améliorer la plante en question pour optimiser sa production, soit en quantité, soit en qualité, soit encore en résistance face aux maladies.Plutôt que de vous parler d’une seule variété cette semaine (et dans les semaines qui viennent), j’ai décidé d’essayer de vous donner un début d’explication sur la génétique de la vigne. Cela me semble utile, vue la quantité de fantasmes et d’informations erronées qui ont circulé sur ce sujet et notamment autour de l’arrachage d’une parcelle de vigne expérimentale, génétiquement modifiée, exploitée par l’INRA à Colmar cet été. Je ne rentrerai pas dans le détail de cette dernière affaire, qui est devant les tribunaux, mais je vais essayer d’apporter un peu d’information de base.

Depuis le début de l’exploitation de la vigne par l’homme, celui-ci a tenté d’améliorer la plante en question pour optimiser sa production, soit en quantité, soit en qualité, soit encore en résistance face aux maladies.

La première approche consiste à sélectionner des pieds de vigne qui réunissent les qualités recherchées parmi un ensemble de pieds dans une parcelle donnée. Cela se faisait d’une manière plus ou moins rigoureuse et essentiellement par contrôle visuel. On va ensuite multiplier ces souches par voie végétative (bouturage, greffage ou marcottage), ce qui fait que les souches-filles restent génétiquement identiques à la plante mère. Cette sélection « asexuée » ne modifie donc pas le patrimoine génétique de la plante.

La sélection massale est une version plus rigoureuse de la sélection parcellaire. Dans ce cas, des souches sont marquées et inspectées trois fois par an pendant trois à cinq ans, afin de contrôler l’identité variétale, la vigueur, l’état sanitaire, le rendement, l’aspect et la couleur des grappes et raisins. On va ensuite récolter le bois (la technique de bouturage) des pieds sélectionnés ayant passé ces tests.

La sélection clonale constitue l’étape suivante. Le bois de chaque souche ayant été sélectionné par sélection massale est ensuite multiplié séparément pour former une « tête de clone ». Et ce clone subit des tests pendant plusieurs années pour vérifier que la sélection soit fiable, utile et résistante aux maladies, etc. Ainsi, pour les principaux cépages, il existe plusieurs clones agréés. Aujourd’hui, il est obligatoire dans les nouvelles plantations d’utiliser des clones ayant reçu cet agrément (ENTAV et INRA).

Les différentes manières d’obtenir de nouvelles variétés, lors d’une pro

La science de la génétique a permis, à différentes époques, d’obtenir de nouveaux cépages hybrides, capables de résister à des maladies, de réunir les qualités de deux parents dans une même variété, mais aussi de mettre au point des porte-greffes résistants au phylloxera par exemple.La semaine dernière j’ai entamé cette petite série en vous parlant des manières asexuées de reproduction de la vigne : soit par marcottage, soit par sélection massale, puis par sélection clonale à partir des sélections massales prises sur les plantes mères. On travaille, dans tous ces cas, directement sur la matière végétale en utilisant la capacité de la vigne à se reproduire ainsi. Un véritable contrôle sur la santé de la plante ainsi reproduite ne peut être assuré que par une sélection clonale testée et garantie, mais les sélections massales ont l’avantage de conserver une certaine biodiversité. La reproduction par marcottage, en revanche, pose le problème de la non-résistance des nouvelles plantes au phylloxera, car ces pieds n’auront pas été greffés sur un porte-greffe résistant.

Mais il existe d’autres techniques de reproduction : par exemple la voie sexuée, en tentant de réunir dans des souches issues de pépins de raisins les qualités des parents, et, si possible, d’en éliminer les défauts.  Cette science de la génétique a permis, à différentes époques, d’obtenir de nouveaux cépages hybrides, capables de résister à des maladies, de réunir les qualités de deux parents dans une même variété, mais aussi de mettre au point des porte-greffes résistants au phylloxera par exemple.

La nature peut elle-même produire des mutations par ce type de reproduction. C’est ce qui explique la très grande diversité de cépages que l’on peut observer dans les pays à vieille tradition viticole. Pour que cela soit plus clair, prenons un exemple. Il y a eu une variété de pinot que l’on va appeler « pinot ancestral ». En se croisant avec d’autres variétés, au fil du temps, cet ancêtre a donné le pinot noir, le pinot moure, le pinot meunier, le pinot blanc et le pinot gris. Mais l’histoire des mutations ne s’arrête pas en route, et le pinot noir à son tour a donné toute une série de variantes que l’on appelle « pinot fin », « pinot moyen », « pinot à port érigé », « pinot à port retombant », etc. En France, c’est l’INRA qui travaille pour recenser les variétés et les liens de famille qui existent entre ces variétés. La semaine prochaine, on parlera du génome de la vigne, qui a permis non seulement d’en connaître davantage sur ces liens de parenté, mais aussi de progresser dans bien d’autres aspects de la connaissance de cette plante fascinante.

Le génome de la vigne

La publication de la séquence du génome de la vigne est bien entendu importante en elle-même, mais cela constitue aussi le point de départ pour une description détaillée de la fonction des gènes de cette plante.On a décrypté la séquence du génome de cette liane qu’est vitis vinifera en 2007, grâce aux efforts de recherche combinés entre plusieurs universités et instituts dans trois pays : France, Etats-Unis et Italie. Il s’agissait d’une première pour une plante à fruit, et la vigne n’était que la quatrième plante concernée par cette découverte, après l’arabette, le riz et le peuplier.

La publication de la séquence du génome de la vigne est bien entendu importante en elle-même, mais cela constitue aussi le point de départ pour une description détaillée de la fonction des gènes de cette plante. Il s’agit donc d’une étape essentielle pour une meilleure compréhension de la variabilité génétique naturelle et de ses liens avec la variation des phénotypes, comme pour la réalisation de divers projets qui vont permettre la sélection ou la création de variétés de vigne résistantes aux maladies. Ces applications devraient contribuer à la réduction de l’utilisation des pesticides et au développement d’une viticulture durable.

L’analyse comparée du génome de la vigne avec ceux de l’arabette, du riz et du peuplier a ainsi révélé que l’organisation du génome de la vigne était la plus proche de celle de l’espèce ancestrale dont toutes ces plantes ont dérivé au cours de leur évolution. Ceci a permis de déduire une organisation possible du génome de l’ancêtre de toutes les plantes dicotylédones. Cet ancêtre possédait un contenu génétique provenant de trois génomes indépendants, un résultat que l’analyse des premiers génomes de plantes n’avait pas permis d’obtenir.

Un autre résultat majeur de cette analyse est l’existence chez la vigne de grandes familles de gènes intervenant dans les caractéristiques aromatiques du vin. C’est le cas, par exemple, des gènes codant de l’enzyme Stilbène Synthase, qui permet la synthèse du resveratrol, un composé qui a été associé à des bénéfices pour la santé en cas de consommation modérée de vin. Le même type de résultats a été obtenu à partir de la séquence du génome pour des gènes intervenant dans la synthèse de terpènes et de tanins, qui sont des constituants majeurs des arômes, des résines et des huiles essentielles.

L’Institut Français de la vigne et du vin

Cet institution officielle est le résultat d’une fusion, en 2007, de deux autres instituts techniques de la filière viticole : l’Etablissement National Technique pour l’Amélioration de la Viticulture (ENTAV) et l’Institut Technique de la Vigne et du Vin (ITV).La base, située près du Grau du Roi, dans le Gard, regroupe différents services et fonctions liés à la recherche et aux études viti-vinicoles, mais l’Institut a aussi des centres dans tous les bassins viticoles du pays.

D’abord ce lieu est un conservatoire de cépages, qui, après avoir été identifiés et vérifiés pour leur absence de viroses, sont mis en sol pour être conservés et, éventuellement, reproduits, ce qui a permis de sauver de l’extinction de très nombreuses variétés. Actuellement 4 570 clones, représentant 570 variétés de vignes (françaises et étrangères), y sont conservés.

La recherche sur les clones capables de résister à des maladies est un autre enjeu important pour cet institut. Quant on considère que 95% des vignes plantées en France sont issues des sélections faites ici, on mesure mieux l’importance de leur activité. Car les clones agréés par l’Institut doivent non seulement être indemnes de maladies virales, mais aussi, si possible, y résister à l’avenir. Des recherches sont aussi conduites sur deux autres fronts : celui de l’abaissement du taux de sucre produit par une plante (pour avoir moins d’alcool dans le vin fini), et, bien sûr, celui de la qualité du vin. Autrefois un rendement élevé était une préoccupation : ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui.

La recherche génétique joue un rôle essentiel dans ces travaux, et j’en parlerai la prochaine fois.

La sélection clonale

En matière de vigne, nous parlons de la reproduction non sexuée par bouturage quand on évoque le clonage.

Cette manière de sélectionner la matière végétale a été développée en France depuis les années 1950. L’objectif étant d’obtenir des plantes qui ne sont pas porteuses de viroses graves, et qui donnent des bons résultats en qualité de vin. On procède de la manière suivante : on choist, dans une parcelle de vigne, des souches dont le comportement correspond le mieux aux besoins du viticulteur ; on coupe un sarment qui est replanté au centre : cette bouture reprend racine, devient un plant de vigne qui sera testé et observé sur plusieurs années, puis, si le clone donne satisfaction, il pourra être reproduit.

Je rappelle que cet Institut a pour principale mission l’amélioration du matériel végétal viticole, tout en maintenant l’identité de chaque variété.

Ses conservatoires régionaux contribuent largement à la préservation du patrimone viticole français, et constituent un lien entre la recherche et la production. Car L’IFV est également producteur de plantes mères et de clones pour greffage, tous agréés pour des raisons sanitaires et diffusés en France et à l’étranger via des pépiniéristes, qui ensuite les multiplient et les commercialisent. L’Institut crée aussi de nouvelles variétés par métissage (entre deux varités de vitis vinifera). Le but ici est double : trouver des solutions au problèmes posés par le réchauffement climatique (montée des degrés d’alcool et apparition de nouvelles maladies), et améliorer la résistance des vignes aux maladies crytogamiques afin de permettre l’abaissement des doses de traitements anti-pourriture.

Il est intéressant de noter au passage que la France est le leader mondial en matière de pépinières viticoles. Cela est en partie dû au fait que les variétés françaises sont, et de loin, les plus demandées à l’international. Mais aussi à la rigueur du travail d’organisation et de certification par l’IFV.

La sélection génétique de la vigne

La sélection génétique est un autre volet de la sélection clonale, dont je vous ai parlé la dernière fois. Elle est obligatoire pour toute certification et est complémentaire de la sélection sanitaire (qui vise l’absence de viroses).

Elle se fait en 5 étapes :

  1. La prospection de souches intéressantes dans des parcelles de vieilles vignes. La recherche s’effectue pendant la période végétative, puis les sarments sont prélevés en hiver et introduits au Domaine de l’Espiguette, dans le Gard.
  2. La culture en conteneurs. Chaque clone est cultivé sous forme de deux boutures racinées et non-greffées, dans un conteneur individuel. Le matériel végétal produit sert pour prélever des bois qui sont destinés à la sélection sanitaire, puis à la confection de plantes pour évaluation dans le vignoble.
  3. Etude dans le vignoble. Cette phase dure au moins 5 ans, avec vinification et dégustation d’au moins 3 récoltes pour évaluer le potentiel des clones candidats. Un maximum de 20 candidats sont mis en place, avec un clone certifié comme témoin.
  4. Analyse de l’ensemble des données et, éventuellement, demande d’agrément. Si cela est accordé et avalisé par le Ministère de l’Agriculture, un numéro officiel est attribué au clone par FranceAgriMer.
  5. Etude de comportement. Une fois le clone agréé, le processus n’est pas terminé car il faut étudier son comportement dans différents types de sols afin de bien conseiller le vigneron sur son emploi (sol, climat, placement, etc) et sa conduite.

L’ensemble de ce processus dure environ 12 ans.

La marque ENTAV-INRA est accordée aux clones commercialisés via un réseau de 34 pépiniéristes et constitue une garantie et une marque d’excellence.

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