Les vins du Liban : Dégustation

Les vins du Liban : Dégustation

Cette dégustation de vins du Liban a eu lieu au restaurant le Crave, dans le quartier d’Achrafieh, à Beyrouth.

La méthode

Chaque domaine a été sollicité pour deux cuvées. Libre à eux de choisir lesquelles, ainsi que le millésime présenté dans chaque cas.

Les vins sont listés, presque toujours, dans l’ordre de leur service, qui fut ordonné (pas par moi, afin de respecter l’anonymat), en commençant par les millésimes les plus anciens. A l’intérieur de chaque millésime, l’ordre était aléatoire. La dégustation a eu lieu dans la matinée du 13 janvier 2011, au restaurant le Crave, dans le quartier d’Achrafieh, à Beyrouth. Les bouteilles étaient toutes masquées. Les prix indiqués (prix publics TTC) sont ceux fournis par les producteurs, pour le marché libanais uniquement, convertis en euros.

Les vins rouges

Château Musar 2001

La robe est patinée et bien plus claire que celle de la plupart des autres vins. Clairement un millésime plus ancien. Le nez est aussi fin que complexe, avec toute la subtilité qui vient d’un long élevage, sans influence marquée du bois : notes de cire, d’épice douce, d’écorce d’orange, de foin, de tabac blond, etc. Il est rare de rencontrer une telle complexité aromatique dans un vin en vente actuellement. Matière raffinée et suave, rendue vibrante par une acidité bien intégrée. Ce très beau vin est aussi long en bouche que complexe. Hors normes contemporaines (et je note que bon nombre d’œnologues ne semblent pas l’apprécier, ce qui montre une triste normalisation du goût !), ce vin me donne l’impression de traverser le temps. Il s’agit certainement de Musar !

Note : 18/20

Hochar Père et Fils 2004

Une autre robe claire et patinée par le temps ! La première bouteille avait un soupçon de bouchon au nez. La deuxième dévoile le genre de complexité si difficile à décrire que j’ai trouvé dans le vin précédent, mais d’une manière un peu moins expansive. La bouche est très suave, polie et patinée, autour de belles sensations fruitées qui évoquent la confiture. Cette belle matière est aussi accessible que chaleureuse et me fait penser à un vieux Rioja. Clairement apparenté au vin précédent, avec un peu moins de complexité. Prix raisonnable pour ce niveau de qualité.

Note :  16,5/20

Château Khoury, Symphonie 2004 (10 €)

Nez assez intense et très attrayant, qui rappelle surtout la prune. La matière est fine, avec le même degré d’intensité qu’au nez. Un vin moderne dans son approche, mais dont les tannins sont fins malgré sa concentration. On peut l’attendre encore quelques années afin de le laisser s’épanouir pleinement. Prix très raisonnable.

Note : 16/20

Château Bellevue, La Renaissance 2005 (17 €)

Le nez est intense mais ne semble pas très expressif à ce stade. Matière dense et un peu massive, avec une pointe d’acidité en finale qui a tendance à durcir l’ensemble (acidification ?). C’est bon mais un peu trop monolithique à mon goût, dans un style assez « international » qui peut plaire.

Note : 15/20

Remarque : J’ai dégusté le 2006 de ce même vin à la propriété et l’ai trouvé mieux équilibré et plus fin.

Wardy, Private Selection 2005 (28 €)

Le nez mêle des notes boisées avec un beau fruité de type cerise noir. Une belle structure, qui reste relativement austère et qui encadre solidement une matière chaleureuse qui comporte, en parallèle, une sensation de fraîcheur. Je ne suis pas totalement convaincu par l’équilibre et l’harmonie, mais c’est un bon vin qui ne manque pas de caractère. Son prix reste élevé par rapport à d’autres.

Note : 15/20

Wardy, Château les Cèdres 2006 (9 €)

Assemblage : cabernet sauvignon, syrah, merlot

Un bon nez de fruit, typé cabernet sauvignon. Mais ce vin semble confus et un peu agressif en bouche, avec des tannins qui assèchent la finale.

Note : 13/20

Château Saint Thomas 2006 (15 €)

Assemblage : cabernet sauvignon, merlot, syrah

Un beau nez qui donne une impression de volume. Vin plus serré et austère en bouche, avec des tannins qui assèchent la sensation de fruit. Trop extrait probablement.

Note : 13/20

Ksara, Cuvée du Troisième Millénaire 2006 (17 €)

Au nez, une belle expression fruitée, assez dense, dont les arômes évoquent le cassis. Vin élégant, reliant structure et fraîcheur autour de saveurs fruitées qui rappellent les fruits à noyaux. Bonne longueur.

Note : 15/20

Château Khoury, Symphonie 2006 (8,50 €)

Le nez dévoile un soupçon de volatilité, pas désagréable, autour d’un fruité chaleureux.  En bouche ce fruit est net et gourmand, souligné par une touche de fraîcheur. Bien structuré pour un vin à ce niveau de prix.

Note : 14,5/20

Domaine des Tourelles, Marquis de Beys 2006 (15 €)

Assemblage : 50% Syrah et 50% Cabernet Sauvignon

Un très joli nez, avec des arômes de fruits rouges et noirs. Gourmand et juteux en bouche, avec des tannins présents mais bien intégrés. Très bon vin, long.

Note : 16/20

Bargylus 2006 (13,50 €)

Ce vin vient de Syrie, mais est élaboré par la même équipe que Marsyas.

Nez chaleureux et très attrayant. En bouche, une belle présence de fruit, et de la gourmandise comme ligne de conduite. Assez long et très bien fait.

Note : 16/20

Coteaux du Liban, Château 2007 (7 €)

Assemblage : syrah, cabernet sauvignon, merlot

Le nez est agréable, chaleureux et fruité (fraise). C’est net et bien fait. Un bon standard à ce niveau de prix.

Note : 14/20

Ksara Château 2007 (7,80 €)

Assemblage : cabernet sauvignon, merlot, petit verdot

Dans le même registre mais en moins bien. Des tannins secs qui dominent le fruit.

Note : 13/20

Château de Botrys, Château des Anges 2007 (14 €)

Assemblage : syrah

Vin très juteux, avec pas mal de structure derrière cette jolie matière. Les tannins sont longs et l’ensemble puissant. Tout n’est pas encore parfaitement harmonieux, encore massif et imposant, mais c’est prometteur.

Note : 15/20

Domaine de Baal 2007 (17,70 €)

Assemblage : cabernet sauvignon, merlot, syrah

Le nez est complexe, autour de notes de cuir, d’épices et de viande. Cela paraît donc nettement plus évolué que le vin précédent, pourtant du même millésime. J’aime bien la délicatesse de ses arômes. Les sensations fruitées en bouche sont gourmandes et presque sucrées au départ, mais se resserrent ensuite autour de tannins encore solides. Vin de caractère.

Note : 16/20

Massaya, Silver Selection 2007 (7,10 €)

Assemblage : cinsault, grenache, cabernet sauvignon blanc, mourvèdre

La robe est peu intense mais la matière est belle, bien équilibrée entre chaleur, fraîcheur et une certaine structure. C’est une réussite à ce niveau de prix.

Note : 14/20

Clos Saint Thomas, Les Emirs 2007 (8,50 €)

Assemblage : cabernet sauvignon, syrah, grenache

Le nez semble terreux et poussiéreux. En bouche la sensation est assez pleine, avec des tannins un peu anguleux. Relativement simple et pas totalement net.


Note : 12/20

Domaine des Tourelles, Syrah du Liban 2007 (27 €)

Le nez est aussi fin que pur, démontrant un élevage luxueux et très soigné et une tonalité fruitée raffinée qui m’a fait penser à certains grands vins d’Italie. En bouche, l’intensité des saveurs (cerises amères) renforce cette impression italienne, avec des tannins fins et soyeux et un très bel équilibre.

Un très beau vin, moderne mais raffiné. Il vaut son prix relativement élevé.

Note : 17/20

Coteaux de Botrys, cuvée de l’Ange 2008 (10 €)

Bon fruit pour un joli vin plein de gourmandise. De la fraîcheur et de la structure.

Note : 14/20

Adyar, Expression Monastique 2008 (7,10 €)

Assemblage : 40% Mourvedre, 30% Syrah, 30% Grenache

Un nez expressif et chaleureux, avec des notes de moka. En bouche, c’est juteux et fin de texture. Sensation aérienne bien agréable. Très bien fait et d’un prix raisonnable.

Note : 14,5/20

Adyar, Monastère de Mar Moussa 2008 (12,70 €)

Assemblage : 40% Syrah, 30% Cabernet-Sauvignon, 30% Mourvedre

Deuxième vin dégusté de cette coopérative qui fédère 8 monastères maronites dans différents secteurs du pays. Celui-ci apparaît plus épicé dans son expression, aussi bien au nez qu’en bouche. Cet accent très « sudiste » est très seyant car la matière est belle, même si l’équilibre n’est pas parfait.

Note : 14,5/20

Massaya, Gold Reserve 2008 (16,30 €)

Assemblage : cabernet sauvignon, mourvèdre, syrah

Le nez nécessite de l’aération à ce stade (réduction). La matière est assez intense et serrée, avec des tannins fins, encore jeunes. Aura besoin d’un peu de temps, mais très prometteur.

Note : 15/20

Ixsir,  Grande Réserve 2008 (12 €)

Le nez, autour d’un bon fruité, est assez fin. Présence de notes boisées dans des limites raisonnables. En bouche, sensation charnue avec des tannins mi-veloutés, mi-rugueux et une matière vivante mais encore un peu rustique. Belle longueur pour ce vin énergique.

Note : 14,5/20

Château Marsyas 2008 (15,60 €)

Le nez est d’abord singulier (vernis à ongle) et nécessite une bonne aération. En bouche c’est une très belle matière chaleureuse avec une texture suave. Les tannins sont bien fondus dans un ensemble puissant qui démontre une belle présence fruitée. Dommage pour le nez.

Note : 15/20

Conclusion sur les vins rouges

Très bon niveau d’ensemble de cette série de vins. Cela signifie que les vins libanais peuvent, sur le plan qualitatif, se mesurer à la production de tout pays ayant un climat similaire, de type méditerranéen. Parmi les points faibles, on doit souligner que la plupart de ces vins, hormis Musar et son second vin, ont des styles assez proches. On utilise très souvent les mêmes assemblages (cabernet sauvignon, syrah et merlot), le climat est uniforme et les sous-sols sont de type calcaire avec en surface des cailloux, argiles, sables ou éléments ferrugineux. Tous – ou presque – partagent la même maîtrise de l’œnologie moderne. La différenciation se joue donc dans la vigne et dans quelques choix de vinification : dates de vendanges, tries ou non-tries de raisins, durées de macération et approches de l‘élevage.

Les vins blancs

Château Musar 2004 (18,40 €)

Encépagement : merwah, obadieh

Encore un vin à part. Nez qui évoque la cire et le miel, le légume vert et blanc, la pomme et un peu les blettes. C’est unique et, pour moi, très beau. La bouche est tout aussi étonnante : j’ai senti des saveurs proches du fruit confit et du gingembre. C’est tout le contraire d’une saturation par la puissance des saveurs. Ce vin est vibrant et on y revient avec plaisir. Ce travail qui joue à cache-cache avec l’oxydation et ses altérations progressives de la matière du vin est porté ici au niveau d’un art. Mais c’est assurément un goût acquis. Pour quelqu’un élevé sur les saveurs des finos de Xérès, l’apprentissage est fait !

Note : 16/20  

Domaine de Baal 2008 (12,70 €)

Encépagement : chardonnay, sauvignon blanc

Un beau nez qui mêle arômes de fruits blancs et jaunes. La matière en bouche apparaît presque sucrée puis se resserre sur une sensation de fraîcheur. La part du chardonnay et un élevage partiel en bois apportent des notes épicées et une finale chaleureuse. Bon vin, non sans finesse.

Note : 14/20

Château Khoury, Rêve blanc (5 €)

Encépagement : riesling, gewurztraminer, chardonnay

Cet encépagement original a produit un vin très plaisant, vif et délicat. Le nez allie vivacité et notes de fruits mûrs. Elégance et bon équilibre sont au rendez-vous en bouche. Joli vin pour un apéritif à un prix très raisonnable.

Note : 14/20

Clos Saint Thomas, Les Gourmets blanc (5 €)

Encépagement : sauvignon blanc, chardonnay

Le nez est très « bonbon anglais ». Matière assez fine mais peu complexe. Vin plaisant.

Note : 13/20

Ixsir Grande Réserve 2009 (9,20 €)

Nez manquant de netteté. Assez standard et ordinaire, sans relief.

Note : 10/20

Coteaux de Botrys, Prince blanc 2009 (8,50 €)

Nez de fruits exotiques. La bouche est curieuse car il y a une présence marquée de gaz et un fruité assez chimique.

Note : 10/20

Coteaux du Liban, Blanc du Clos 2010 (5,50 €)

Encépagement : chardonnay, viognier

Assez ordinaire : chaleureux et manquant de relief.

Note : 11/20

Kefraya, blanc de blanc 2010 (6 €)

Nez de bonbon anglais. Vin très standard.

Note : 11/20

Wardy, Sauvignon blanc 2010 (5,50 €)

Une certaine tenue par une acidité bien présente, et une pointe d’amertume en finale.

Note : 12/20

Ksara, Chardonnay 2009 (8,50 €)

Une belle matière un peu trop masquée par un boisé marqué. Vin agréable mais un peu lourd et manquant de relief.

Note : 12,5/20

Bargylus blanc 2009 (22 €)

Vient de Syrie mais élaboré par l ‘équipe de Marsyas. Nez moyennement expressif. Une matière raffinée mais sans grande complexité. Plaisant mais bien trop cher pour ce niveau de vin.

Note : 13/20

Marsyas blanc 2009 (10,50 €)

Un bon vin assez direct et simple. Désaltérant mais pas fascinant.

Note : 13/20

Conclusion sur les vins blancs

Sur la base de cette dégustation, je ne peux que constater un grand écart entre la qualité moyenne des vins rouges et des vins blancs du Liban. Il est vrai que j’ai pu déguster, plus tard et à la propriété, d’excellents vins blancs du Domaine Wardy mais, dans cette série, il y avait trop de vins ordinaires ou présentant des défauts. Le chardonnay et le sauvignon blanc ne se révèlent pas passionnants sous ce climat ensoleillé et le viognier, en expansion, n’est pas plus convaincant (encore une fois hormis un vin de Wardy). Musar à nouveau se singularise en utilisant deux cépages autochtones, dont le merwah qui paraît particulièrement intéressant. L’autre, l’obadieh, est la variété utilisée pour l’arak (quand celui-ci est fait avec des raisins, ce qui n’est plus obligatoire !).

Découvrez également notre article sur les vins du Liban.

Commentaires (2 )

  • Fouad Akkari

    Très bonnes appréciations à tous les niveaux. Les vins libanais sont bons mais ont tous plus ou moins la même composition et utilise les mêmes cépages.
    Pour diversifiez le marché pensez vous que l on peut fait un bon Malbec dans la Bekaa?

  • Gilles Lejeune

    Bonjour,
    Et merci de ces belles notes de dégustation.
    Effectivement, généralement les vins libanais sont relativement peu appréciés, encore moins connus et plus difficilement encore accessibles, du moins pour les maisons les plus prestigieuses ou les plus confidentielles.
    Pour ma part, j’ai eu l’occasion d’effectuer une très longue et passionnante visite du chai du Château Musar en compagnie du fils Hochar en fin 2009. Il me confiait alors que le potentiel de garde et l’évolution du vin en dégustation ne connaissaient aucune limite. Son père n’hésitant pas à ouvrir une bouteille 24h à l’avance pour en apprécier l’évolution presque d’heure en heure. Votre appréciation rejoint ainsi entièrement la mienne pour ce millésime 2001 rouge dont il me reste une ou deux bouteilles. Ce vin est à mon sens hors norme. Les prix des bouteilles s’en sont ressentis d’ailleurs.
    Un dernier mot à propos d’un domaine beaucoup moins connu mais à mon sens du même calibre que le Château Musar, peut-être plus facile d’accès en terme de dégustation du moins. Il s’agit du domaine Atibaia que je viens de découvrir. Remarquable et encore très abordable.

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