Bordeaux : Les crus classés 2006

Bordeaux : Les crus classés 2006

A Bordeaux, le terme « cru classé » désigne une propriété dont le vin a été retenu lors des différents classements qui se sont succédés depuis 1855.

Qu’est-ce qu’un « cru classé » à Bordeaux ?

Le plus connu et le plus ambitieux des classements bordelais est celui de 1855 qui s’est occupé de classer les châteaux du Médoc (en 5 rangs) et de Sauternes (en deux rangs). Effectué à la demande du commissaire Jérôme Bonaparte, en vue de l’exposition universelle de 1855, il a été établi en prenant comme critère quasi-unique de classement le prix de vente des vins sur une longue période. Beaucoup d’autres classements[1] officieux avaient précédé celui de 1855 avec – en gros – les mêmes hiérarchies, mais celui-ci a eu l’accolade officielle. Cependant il n’a pas vocation à être révisé : en 153 ans d’existence, une seule retouche a été effectuée avec la promotion au rang de 1er cru classé de Mouton-Rothschild, en 1973.

En 1953, les meilleurs vins secs (rouges et blancs) de la région bordelaise des Graves – à l’exception notable de Haut-Brion, déjà classé avec les Médoc pour des raisons historiques – ont été classés à leur tour selon des critères mêlant prix du marché et dégustations.

Le classement des vins de Saint-Emilion, créé en 1955, est le plus exemplaire par sa procédure qui prend en compte, pour chaque propriété qui en fait la demande, la stabilité de l’assiette foncière, la réputation, les cours du marché et le résultat de dégustations des vins. Il l’est aussi, et surtout, par sa révision décennale.

Quant à Pomerol, il n’existe pas de hiérarchie officielle même si certains[2] s’y sont essayés à plusieurs reprises.

Les vins classés sont-ils toujours bons ?

Certes on pourra rétorquer « bon pour qui ? » ou « bon pour quoi ? », mais passons outre les goûts individuels et les circonstances. Ce que l’on demande à un cru classé, c’est un surcroît d’intensité, de concentration, de finesse, de complexité, de capacité de garde ; bref, un peu plus de tout, ce qui est bien normal vu son niveau de prix.  La plupart des crus classés remplissent ces exigences, avec plus ou moins de zèle. Depuis leur premier classement en 1855, une sorte de cercle vertueux s’est mis en place : ces vins étant vendus plus chers que les autres, leurs propriétaires ont pu investir davantage pour élever en permanence le niveau de qualité des vins.

Dans le Médoc, une logique d’échelle explique aussi la régularité des crus classés : la taille des propriétés et, avec elle, la possibilité de jouer sur les assemblages, de replier une proportion plus ou moins importante de la récolte dans des seconds ou même des troisièmes vins, ce qui donne une liberté que l’on n’a pas forcément avec de plus petites surfaces, comme sur la rive droite.

Le niveau de classement est-il fiable ?

Autrement dit, dans le Médoc, un 3ème cru peut-il être moins bon qu’un 5ème cru ? A l’exception des « premiers crus », dont le rang est justifié, et des « deuxièmes crus », dont la plupart valent leur rang, le niveau de classement est peu significatif. Des troisièmes crus tiennent leur rang, d’autres moins, et certains cinquièmes crus ont valeur de seconds crus. Très peu affichent d’ailleurs leur rang sur l’étiquette mais la plupart indiquent simplement la mention « cru classé ».

A Saint-Emilion, le rang se lit dans les mentions : Grand Cru Classé A, Grand Cru Classé B et Grand Cru Classé, une hiérarchie qui reflète assez fidèlement le niveau des vins, d’autant plus qu’elle est révisée, en principe, tous les 10 ans.

Pourquoi sont-ils plus chers ?

Parce qu’ils sont classés. Et pourquoi sont-ils classés ? Parce qu’ils se vendaient plus chers ! Façon de dire que dans le prix des vins du Médoc, une dialectique infernale a figé les choses. Pour le reste, les prix sont liés à la réputation du millésime, à la notoriété du château et à la notation des vins par quelques critiques plus ou moins médiatisés. Les prix ont flambé avec le millésime 2005, de façon aberrante. Les millésimes moins encensés qui ont suivi, et la crise récente qui risque de durer, ont commencé à faire dégonfler la bulle : on est en train, espérons-le, de revenir à des niveaux de prix bien plus acceptables et qui rendront ces vins un peu plus accessibles à des amateurs qui ne sont pas milliardaires !

Que vaut le millésime 2006 ?

Entre un 2005 d’anthologie et un 2007 probablement trop méprisé, le millésime 2006 serait une sorte de moyenne. Evidemment, chaque vin a sa vérité et ce type de raccourci est d’une valeur très limitée, mais on peut dessiner à gros traits les caractéristiques du millésime : une météo un peu chaotique, marquée par une alternance de fortes chaleurs (juillet et septembre) et de fraîcheur (août) avec des épisodes orageux en septembre. Les blancs secs sont aromatiques et frais, globalement réussis. Les rouges de la rive gauche offrent un visage plutôt séduisant avec une agréable qualité de fruit, de la fraîcheur et des structures fermes qui en font, majoritairement, des vins de garde. Sur la rive droite, les vins possèdent cette même fraîcheur caractéristique du millésime avec, pour les meilleurs, des tanins droits et mûrs. A Sauternes, l’alternance marquée de périodes sèches et humides à partir de la fin août a permis un développement rapide du botrytis : c’est donc là aussi un millésime plutôt réussi.

[1] William Johnston en 1813, Guillaume Lawton en 1815, André Jullien en 1816, 1822 et 1832, Franck et Henderson en 1824 parmi d’autres

[2] Féret en 1929 avec une répartition en cinq rangs, les courtiers bordelais en 1941,  ou Alexis Lichine en 1980 dans son Encyclopédie des Vins et des Alcools de tous les pays avec, également, un classement en cinq catégories.

 

Les meilleurs vins de Bordeaux et d’ailleurs sont sur notre comparateur de goûts.

Commentaires (2 )

  • Julienne

    Pour moi le classement de Pour moi le classement de 1855 ne veut rien dire, il est complètement obsolète.
    Vos notes me paraissent beaucoup plus pertinentes, et je les suis bien volontiers. Merci !

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