Comment déguster un vin ?
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Comment déguster un vin ?

Dans les cours précédents, j’ai essayé de donner quelques notions sur les ingrédients de base qui constituent le vin : la couleur, les arômes (odeurs), puis les saveurs fondamentales qui sont le sucre, l’acidité et ce qui est produit par les tannins (qui sont associés à l’amertume). Voyons maintenant à quoi cela peut servir lorsque nous dégustons un vin.Je ne suis pas très partisan d’une approche « classique » de la dégustation, telle qu’elle est enseignée dans trop d’écoles (de sommellerie, par exemple) en France, car j’estime qu’elle donne trop d’importance à des éléments secondaires, et pas assez à d’autres qui sont, à mon avis, plus essentiels pour juger et apprécier un vin.

Prenons la couleur, par exemple. On commence presque toujours une dégustation « classique » en observant et en décrivant la couleur d’un vin, alors qu’elle est l’élément le moins important et surtout l’indicateur le moins fiable quant à sa qualité supposée.

L’aspect visuel du vin

Couleur et qualité

La tendance actuelle, dans le cas des vins rouges, est d’associer couleur foncée et vin « de qualité » car c’est un signe de concentration. Ici le problème est double : les cépages ne possèdent pas naturellement la même intensité de matière colorante. Le pinot noir, le nebbiolo ou le sangiovese ne donnent pas autant de couleur que le malbec, le cabernet-sauvignon ou la syrah. Mais on fait de très grands vins rouges en Bourgogne, dans le Piemont ou en Toscane, régions qui utilisent ces cépages pour leurs meilleurs vins. Un des coupables de cette dérive « colorante » est certainement le critique américain Parker (mais il n’y a pas que lui !) qui semble préférer les vins foncés. Le problème tient au fait que certains producteurs cherchant en cours de vinification à extraire un maximum d’anthocyanes (qui contiennent la matière colorante) extraient en même temps, parfois de manière excessive, d’autres substances issues des peaux, particulièrement les tanins, au point de rendre les vins quasiment imbuvables. Bien sûr, il y a aussi des justifications techniques à l’extraction de la couleur, comme la stabilité chimique d’un vin, mais cela est une autre affaire.

La description de la couleur, autre problème

Une anecdote personnelle suffira à illustrer la question. Il y a des années, je suivais un cours de dégustation à Bordeaux avec un excellent professeur, Pierre Casamayor. Décrivant la robe d’un vin rouge, il utilisa le qualitatif de « rouge cerise ». Nous étions au mois de mai et, le lendemain matin, je suis passé au marché avant de rejoindre le cours. J’ai déposé sur le bureau du professeur une poignée de cerises en posant la question : « cher professeur, laquelle de ces cerises est d’une teinte rouge cerise » ? ». Effectivement, la gamme de couleurs des cerises allait du crème au violet foncé. Le prof, très « fair play », a répondu « touché ».

Les mots sont notoirement insuffisants pour décrire les couleurs, et nous ne percevons pas, les uns et les autres, les mêmes choses avec les mêmes mots.

Il faut aussi parler de l’effet de suggestion sur les arômes que les dégustateurs pensent percevoir, mais qui sont en réalité largement influencés par la couleur (vin foncé = cassis etc, vin rouge plus clair = fraise ou framboise, vin jaune profond = abricot/pêche, vin blanc clair = citron/pomme). Nous vivons dans une société visuelle, ne l’oublions jamais, et l’être humain est très influençable !

Conclusion

Je conseille prudence et retenue quand on parle des couleurs d’un vin !

Bien sûr, à la base, elle nous permet de distinguer un blanc d’un rouge, et ces deux-là d’un rosé. Le même outil (c’est-à-dire l’œil) nous permet aussi de savoir si le vin est effervescent ou pas.

Mais il y a d’autres indications à puiser dans la couleur d’un vin. Pour percevoir les nuances de cette couleur, il est important d’avoir un verre bien transparent et propre, et d’être dans un lieu bien éclairé, avec une surface blanche en-dessous du verre.

Si vous inclinez votre verre, vous verrez une nette différence d’intensité entre la couleur au centre du liquide et la couleur sur les bords du verre. Ces nuances de ton peuvent donner un indice quant à l’âge d’un vin, car il faut savoir qu’un vin rouge va perdre de la couleur, en se brunissant progressivement avec le temps, tandis qu’un vin blanc va gagner de la couleur, tout en brunissant aussi. Ce processus va être plus ou moins long, et plus ou moins marqué, en fonction du type de vin et de sa conservation. Ce brunissement est le résultat de l’oxydation progressive du vin. Plus le vin est vieux, plus il sera brun. Là, comme ailleurs, tout est relatif, et il vaut mieux comparer deux vins du même type (région, cépage, niveau de concentration ou de prix) au départ pour avoir un bon point de comparaison.

Dans un vin rouge jeune (moins de 3 ans), les bords vont avoir un ton bleuté ou violacé, quelle que soit l’intensité de la couleur. Si ce n’est pas le cas, cela peut indiquer un vieillissement prématuré, parfois dû à une absence de soufre dans le vin et/ou à un mauvais stockage, souvent à cause d’un bouchon défectueux (je rappelle qu’un peu de soufre est nécessaire, mais que trop de soufre abîme le vin et fait mal à la tête : les vins « sans soufre » sont une fausse bonne idée et une bêtise commerciale absolue, car on ne peut ni les transporter, sauf précautions délirantes, ni même les consommer parfois…).

Un vin blanc peut aussi nous «parler» un peu à travers sa couleur. Un blanc léger et vif (acide) aura généralement une couleur pâle. Un blanc plus puissant, surtout si le vin a séjourné dans des barriques en bois, aura une couleur plus soutenue, souvent d’un jaune doré. Il y a une gamme importante de nuances, comme pour les vins rouges, mais on ne peut pas toujours déduire grand chose de ces nuances !

Conclusion : appréciez les couleurs pour le plaisir des yeux, mais n’essayez pas de trouver le goût du vin dans sa robe. L’habit ne fait pas le moine !

L’odeur du vin et ses arômes

Après avoir parlé de la couleur d’un vin, nous allons attaquer la question de son odeur. Le «politiquement correct» voudrait que nous parlions plutôt d’arômes. Peu importe, il s’agit bien d’odeurs, qui peuvent paraître plus ou moins agréables, mais qui sont captées par le nez. Appelons-les «arômes» si on veut.

Le nez est un outil plus important que l’œil dans la dégustation (sauf pour lire les étiquettes, bien sûr), mais bien moins important que la bouche. Cela me semble logique : après tout, on boit un vin par la bouche, et non pas par le nez ! Mais il y a des zélés du nez, qui vont vous assommer pendant des heures avec tout ce qu’ils sentent ou imaginent sentir dans un vin. J’appelle cette approche le style «salade de fruits» et je la trouve souvent excessive, et pas toujours pertinente.

Les arômes primaires

Le principal problème de cette approche «d’expert» qui fait des arômes une question essentielle, est qu’elle a tendance à effrayer le commun des mortels. Cela donne un effet de «singe savant» (ou de «précieuse ridicule») récitant sa leçon, et l’auditeur pourra se sentir incapable ou handicapé du nez parce qu’il ne peut pas sentir la moitié de ce dont on lui parle.

Un peu comme pour la couleur, les mots utilisés pour décrire les odeurs d’un vin sont totalement insuffisants pour cerner les infimes nuances qui existent dans un vin. De plus, ils supposent non seulement des sensibilités identiques (entre la personne qui parle et celle qui reçoit le message), mais aussi un champ d’expérience partagé. Parler d’arômes de fraise et réussir à communiquer la majeure partie de ce que l’on veut dire implique que la personne qui écoute ait pu capter cet arôme, avec une intensité plus ou moins proche, mais aussi qu’elle ait déjà senti ce fruit afin de pouvoir nommer l’odeur associée. Vous pouvez parler d’arômes de fraises à des chinois (de Chine) autant que vous voulez, ils ne connaissent pas nécessairement ce fruit et cela ne signifiera donc rien du tout pour eux !

Mais le nez reste utile dans la dégustation. Pour lui donner sa chance, il faut déjà disposer d’un verre qui puisse à la fois laisser les arômes se développer et les diriger vers le nez. Autrement dit, un verre ayant un bol relativement grand, et un buvant resserré. Ce n’est pas la peine d’aller vers le gigantisme, mais un verre trop petit, comme le verre dit INAO, est un peu juste pour laisser s’épanouir les arômes des jeunes vins.

Même si les vins sont plus ou moins aromatiques, la première qualité d’un bon vin est de sentir bon, et donc de donner envie d’y tremper les lèvres. Cela peut sembler banal, mais il y a encore trop de vins qui ne mettent pas en appétit par leurs arômes. Evidemment il y a certains défauts liés au bouchon, qui peuvent donner lieu à des odeurs de moisissure. L’odeur de soufre excessif, qui pique le nez, n’est pas agréable non plus.  Mais pas plus que les odeurs animales que l’on rencontre souvent parmi ces vins dits « naturels », dépourvus de cette petite dose de soufre nécessaire à tuer les bactéries souvent présentes dans un produit vivant comme le vin. Ces bactéries se développent ensuite et peuvent donner lieux à des odeurs que je qualifierais de « basse-cour », pour rester poli !

La première qualité d’un vin, sur le plan olfactif, est de sentir bon, et, si possible, que ses odeurs paraissent nettes. Net, cela veut dire ni trouble, ni déplaisant.Restant dans les généralités, on peut aussi juger de l’intensité des odeurs. Mais, comme pour la couleur, l’intensité n’est pas nécessairement un signe de qualité supérieure. Un vin qui est discret dans ses arômes peut être de très grande qualité, et, à l’inverse, un vin ayant des odeurs exubérantes peut se révéler ordinaire à la dégustation. On voit qu’il n’y a pas de règle «simple» dans ce domaine.

Le monde des arômes fascine souvent, et il est vrai qu’un «nez» sensible et bien entraîné peut identifier une centaine d’odeurs. Mais nous ne sommes pas tous entraînés, et tout le monde a sa propre sensibilité et son propre champ d’expérience, alors je conseille plutôt d’aller vers ce qui peut être partagé par le plus grand nombre, c’est à dire les «familles» d’arômes, plutôt que de passer directement à l’identification d’arômes spécifiques.

On peut trouver, par exemple, dans certains vins des arômes qui rappellent les fruits blancs. Cette famille inclut toutes les variétés de pommes et de poires. Et pas besoin de préciser «pomme granny smith, cueillie en Normandie vers 17h un dimanche après-midi du mois de septembre, en pensant à la chair tendre de la jeune fermière». Cette dernière référence étant certainement très proustienne (et probablement aussi très érotique) pour vous, mais peut-être pas toujours très parlante pour ceux qui vous écoutent. «Fruits rouges», «fruits noirs» ou «agrumes» suffisent amplement pour décrire d’autres sous-familles d’odeurs fruitées. Nul besoin de faire le fanfaron en parlant de «fraise des bois», de «cassis de Dijon» ou de «clémentine de Chypre», sauf si cela est d’une grande évidence pour tout le monde.

Puis vous avez la famille des feuilles, ou, plus large encore, du végétal, des épices, de la cuisson, de l’animal, du minéral, etc. Ces familles peuvent effectivement aider à cerner certaines caractéristiques de jeunes vins qui possèdent encore ces arômes dits «primaires» ou «secondaires», et qui sont liés, pour l’essentiel, à la combinaison entre le cépage et le climat.

Avec le temps, ces odeurs se transforment et deviennent plus compliquées à décrire. Ce sera le sujet de notre prochaine leçon.

Les arômes d’un vin plus vieux

J’ai évoqué les arômes d’un vin, mais essentiellement dans le contexte de vins jeunes. Mais un vin qui a «de la bouteille», c’est à dire qui a vieilli dans votre cave (ou dans une autre) pendant quelques années, voire décennies, ne sentira plus les fleurs ni les fruits. D’ailleurs il est souvent très difficile de mettre un nom sur ces odeurs, tellement la combinaison devient originale et complexe, assez éloignée des arômes du quotidien. Cette complexité est d’ailleurs un des intérêts majeurs des vins qui vieillissent (bien).

Pour résumer cette complexité, on parle parfois de «bouquet», pour donner la mesure de ce cocktail d’arômes différents.

Souvent, pour les vins rouges, on trouve des ressemblances avec le cuir, le tabac, voire des notes très proches de l’animal. Les vins blancs voient leurs arômes virer vers différentes sortes de miel. Sans verser dans un épisode des précieuses ridicules, on peut se hasarder à proposer quelques analogies pour ces sensations olfactives. Mais sans jamais oublier que chaque bouquet est à peu près unique, et peut être perçu différemment par des individus, car nos appareils olfactifs varient en sensibilité, et nos expériences sont personnelles. Un individu peut très bien dire «foin» pour une odeur donnée, et son voisin évoquer la «paille». Les deux étant assez proches, nos deux individus auront tous deux raison.

L’essentiel est d’apprécier l’expérience de ce bouquet unique et transitoire, et le fait de pouvoir nommer ses ingrédients est totalement secondaire, à supposer même qu’il soit possible de les séparer. Pour prendre une analogie avec un autre domaine esthétique, est-ce que le fait de pouvoir nommer le code «Pantone» (système de codification des couleurs) d’un ton dans un tableau de Rembrandt vous aide à apprécier ce tableau ?

Aimons donc les vins pour les plaisir sensoriels qu’ils nous donnent, sans devenir obsédés par une manie descriptive !

Les arômes secondaires

Après la famille des arômes primaires, qui viennent plus ou moins directement du raisin lui-même, le deuxième grand groupe d’arômes est décrit comme « arômes secondaires ».Ils ont leur origine dans le processus fermentaire et sont le fait de levures ou de bactéries qui opèrent à ce stade en « mangeant » les sucres et acides aminés du raisin pour former des alcools supérieurs. Le premier de cette famille d’arômes est donc l’alcool lui-même. Il peut parler avec des accents très variables : on décrit ses arômes comme étant chaleureux ou alcooleux, mais aussi améliques, de frangipane ou même de rose. Une autre grande famille d’arômes de cette catégorie est celle des esters : esters d’alcool qui fleurent la banane, esters éthyliques d’acides gras qui évoquent les fruits : poire, pêche, ananas ou fruits rouges. Au cours  des fermentations, levures et bactéries laissent leurs empreintes : notes de brioche ou de pain pour les premières, arômes beurrés ou lactés pour les secondes.

Ce types d’arômes qui se tassent, ou se fondent, au cours du vieillissement des vins est par contre  logiquement très présent dans les vins primeurs parce que mis sur le marché peu de temps après les fermentations. L’exemple type en est le Beaujolais Nouveau. Les producteurs peuvent d’ailleurs influer sur ces arômes en jouant sur les températures de fermentation, sur des apports en oxygène ou en azote et surtout en choisissant des levures spécifiques. La mode passagère pour les beaujolais aux francs arômes de banane s’explique par le recours à des souches sélectionnées : ces levures naturelles sont choisies pour leurs capacités et leurs aptitudes, puis cultivées en laboratoire et réintroduites dans les cuves.

Le goût du vin

Si les odeurs, ou arômes, d’un vin s’apprécient surtout au nez, on parle de saveurs pour la perception en bouche.En réalité les choses sont un peu plus complexes que cela, car les arômes sont également perceptibles en bouche, grâce à une liaison entre la fosse nasale, où est logé le bulbe olfactif, et le fond du palais. Pour vous convaincre de la réalité de cela, il suffit de prendre un peu un vin en bouche puis de se boucher le nez. La finesse de votre perception va progressivement baisser, ne laissant que des sensations d’acidité, d’amertume et de sucre, pour simplifier. Toutes les nuances dues aux arômes vont disparaître car vous avez coupé le courant d’air qui permet aux molécules olfactives de monter vers le bulbe olfactif. Maintenant, si vous débouchez votre nez (j’espère que vous êtes encore là !) ces nuances vont revenir progressivement. Nous vivons une sensation analogue lorsque l’on a le nez bouché par un rhume. On dit couramment qu’on a perdu le goût. En réalité nous perdons l’olfaction.

Les saveurs de base

Pour parler des sensations proprement gustatives, il est courant de parler des 4 saveurs dites « de base » : le sucre, l’acidité, la salinité, et l’amertume. Cela me fait penser à une description d’un arc-en-ciel qui n’emploierait que les trois couleurs primaires. D’ailleurs, à différentes périodes et dans différentes cultures, on a nommé ou on nomme davantage de saveurs. Le sucre est assez facile à cerner, d’autant plus qu’il s’agit de la seule saveur « de base » dont l’appréciation est à peu près innée et universelle. Par contre il faut un certain apprentissage pour apprécier l’acidité ou l’amertume. Ceux qui n’aiment ni l’un ni l’autre rajoutent du sucre partout, dans un citron pressé comme dans une tasse de thé ou de café. L’amertume, que l’on trouve couramment dans les endives, la bière ou le café, se perçoit surtout vers le fond de la langue. L’acidité se ressent surtout sur les muqueuses à l’intérieur des joues, provoquant une salivation prononcée. Dites le mot « citron » et constatez le résultat.

Une salinité marquée est rare dans des vins, mais on peut parfois la ressentir.

Les vins contiennent des proportions très variées de ces saveurs de base. Un vin blanc sec (c’est à dire non-sucré) va sembler « sec » car plus ou moins acide. Un vin blanc sucré peut contenir autant d’acidité qu’un blanc sec, mais cette acidité sera masquée par la présence de sucre. Et ainsi de suite. Pour décrire une relation harmonieuse entre ces constituants, on utilise parfois le mot « équilibre » (ou harmonie). Nous sommes toujours dans le subjectif et le jugement esthétique avec le vin.

La perception des saveurs en bouche

Je vais vous parler d’un autre aspect important, mais trop souvent négligé, de la perception d’un vin en bouche : la texture ou le toucher.

N’oublions pas que le mot anglais « taste », qui désigne le goût, vient du français « tâter », qui signifie palper, toucher. Un « tastevin », cher aux bourguignons, est un témoignage de cette ancienne connivence entre toucher et goûter, car la dimension tactile est ce qui différencie le plus les sensations perçues par la bouche de celles perçues par le nez. Cette dimension tactile est d’ailleurs celle qui nous permet de percevoir que l’on a à faire à du liquide et non à du solide.

C’est tellement fondamental et évident que la plupart des commentaires sur le vin semblent ignorer cette dimension tactile ! Cela me surprend beaucoup, mais peut-être suis-je particulièrement sensible au toucher !

Un nerf puissant et hypersensible, que l’on appelle le nerf trijumeau (et qui se rappelle bien à nos souvenirs lors des rages de dents) gouverne cette perception.

Les vins n’ont pas la même texture, et cela les différencie autant que les saveurs ou les arômes. Sentez la différence entre la fluidité d’un sancerre, élevé en cuve, et celui d’un meursault, élevé en barriques ; même chose entre un beaujolais et un jeune pauillac, par exemple. Leurs différences sont aussi tactiles qu’autre chose.

Bien sûr, il n’est pas toujours facile de séparer ce qui est purement tactile de ce qui résulte de combinaisons chimiques dans la bouche. La perception des tannins illustre bien cela. Les tannins jouent un rôle colloïdal, agglutinant les molécules de la salive et donnant une impression de sécheresse en bouche. Mais les molécules combinées de ces tannins peuvent être plus ou moins grosses, donnant ainsi une sensation tactile plus ou moins rugueuse sur les muqueuses de la bouche. Un vin vieux, dans lequel les tannins se sont fondus avec le temps, aura donc une texture bien plus lisse que le même vin jeune.

Maintenant, j’espère que vous serez plus attentifs aux textures des vins.

La longueur en bouche

La longueur en bouche est le sujet de cette leçon. Non, il ne s’agit pas d’un extrait de « Deep Throat », mais de la durée des sensations gustatives en bouche, une fois le vin avalé ou craché.C’est une notion un peu difficile à cerner, car, en principe, on doit tenir compte de l’ensemble des sensations gustatives, et pas simplement d’une saveur seule qui peut être particulièrement persistante : je pense au sucre ou à l’acidité, voire à l’amertume, qui peuvent laisser leur sillon en bouche assez longtemps.

Non, pour juger de la longueur en bouche d’un vin, il faut bien imaginer un ensemble de saveurs et de textures qui laissent une trace harmonieuse et qui rappellent, aussi complètement que possible, le vin.

On utilise parfois un mot du jargon savant pour exprimer la mesure de cette sensation de persistance. Le mot « caudalies » exprime le nombre de secondes pendant lesquelles le goût persiste en bouche. Comme tous les mots de jargon, celui-ci est à peu près inutile (il fait « savant »), car autant utiliser le terme de « seconde » qui signifie la même chose.

Mais cette notion est tout à fait importante pour juger un vin dont l’ambition est de bien durer dans le temps. Presque tous les vins de garde ont des saveurs persistantes. D’ailleurs je trouve que c’est une manière assez simple et directe de juger de la valeur d’un vin. Plus il est cher, plus il devrait durer, aussi bien dans le temps (en cave) qu’en bouche.

Un vin « long en bouche » est donc, généralement un vin ayant une bonne capacité de garde par la concentration de ses saveurs. Mais attention, concentration ne veut pas dire puissance pure, n’en déplaise à certains critiques américains. Un vin peut très bien être concentré et fin, comme Ducru-Beaucaillou, par exemple.

L’équilibre d’un vin

Qu’est-ce que cela veut dire ? Un vin fait-il de la gymnastique ? En quelque sorte, oui, car il doit réussir, dans votre bouche, à donner une impression d’équilibre entre des saveurs assez contrastées, en intégrant textures et arômes, sans emporter la bouche par des excès, sans jamais ennuyer, et toujours en donnant du plaisir. On pourrait même dire que, devant les exigences d’un palais averti, le bon vin est le plus habile des gymnastes !

Imaginons un vin blanc. Il peut contenir toute une série de parfums et de saveurs qui incluent l’acidité, la sensation de gras, des saveurs fruitées plus une note d ‘épices, une petite touche de sucre et une sensation de puissance qui vient, en partie, d’un alcool qui se fait remarquer. Très bien, il s’agit d’un vin riche et puissant mais est-il « équilibré » ? Et pour qui, pour quelle occasion ?

Un même vin goûté seul puis avec des mets ne donnera pas les mêmes sensations. Et la notion d’équilibre devrait aussi tenir compte de ce paramètre. Beaucoup de jeunes vins rouges dégustés seuls paraissent agressifs par leurs tannins, mais lorsqu’on les déguste avec un steak, par exemple, certains apparaîtront délicieusement fruités et dépourvus de toute rudesse de texture.

Un vin équilibré, oui, mais pour être bu tout seul ou avec un plat ? Et avec quel plat ?

Vous le voyez, ici je ne fais que poser des questions.

Résumé sur le goût

Avant de passer à d’autres sujets, résumons cette affaire de goût, dont je parle depuis quelques semaines. Dans le goût, il faut bien distinguer le « goût de… », et le « goût pour… ». Le premier (le goût de…) est une affaire physiologique ; le deuxième (le goût pour…) est une affaire esthétique. Mais l’un ne va pas sans l’autre, en tout cas dès que quelqu’un possède un peu d’expérience et un petit sens de la relativité.

Dans la partie physiologique de l’affaire, nous avons séparé, un peu artificiellement, ce qui est perçu par le nez et ce qui est perçu par la bouche. En réalité tout cela fait partie d’un ensemble. J’exclus volontiers l’aspect visuel des choses (et donc d’un vin), car cela relève d’un autre type d’expérience sensorielle, dicté en partie par des phénomènes de « mode » (« un rosé de Provence doit être pâle de couleur », ou « un vin rouge doit être foncé pour être bon ». Avouez que tout cela n’a rien de bien factuel !).

Le « goût de… » prend en compte parfums, saveurs, textures, durée (ou rémanence) de ces sensations (notre fameuse « longueur en bouche ») et équilibre plus ou moins harmonieux entre ces différents éléments. On voit que le jugement esthétique arrive vite sur la scène, et qu’il est inséparable des jugements que nous portons sur un vin. Autrement dit, un jugement « objectif » sur un vin n’existe pas. Il ne peut être que subjectif, mais peut, par le truchement de l’expérience cumulée et l’intelligence du dégustateur, être relié à d’autres expériences similaires et donc à la notion de relativité.

Autrement dit, un dégustateur expérimenté et réellement épicurien comparera ce qui est comparable et ne se contentera pas de dire « je préfère le Bordeaux au Bourgogne », comme on dirait « je préfère Turner à Van Gogh ». Car il s’agit d’expériences appartenant à deux registres différents. En revanche (et si on dispose de moyens considérables), on peut très bien préférer, parmi les Bourgognes, les vins du Domaine de la Romanée Conti.

Le goût, c’est aussi savoir relativiser ses jugements.

Le rôle de la salive dans la dégustation

Je sais bien que ce sujet n’est pas très « sexy », mais il est néanmoins essentiel pour comprendre pourquoi nous n’avons pas toujours les mêmes sensations quand nous dégustons le même vin.

Chaque être humain est différent d’un autre, et cela dans tous les détails de son corps. Il n’y a donc aucune raison que la bouche et ses mécanismes échappent à cette règle. Par exemple, le dégustateur A trouve tel vin rouge raide, astringent, sec et rugueux, tandis que le dégustateur B trouve le même vin, bien au contraire, soyeux, juteux, souple et délicieux. Comment peut-on expliquer un tel écart d’appréciation ?

Nous savons qu’un vin peut s’apprécier par la vue (un peu), par le nez (un peu plus), et par la bouche (surtout). Mais, alors que l’on s’étend à n’en plus finir sur les arômes (réels ou imaginaires) d’un vin, on parle assez peu des mécanismes et substances qui permettent des échanges entre le vin et les parties sensibles de notre bouche : ce qu’on appelle, pompeusement, l’environnement buccal.

Il y a un ingrédient essentiel, mais assez ignoré, qui intervient dans les échanges entre nous et une boisson ou un aliment : la salive.

Qu’est-ce que la salive ?

La salive est une solution aqueuse produite par trois glandes dans différentes parties de notre cavité buccale. Elle coule en permanence, et sans stimulation particulière. Si vous essayez de ne pas déglutir, votre bouche va se remplir de liquide, puis vous allez baver ! Mais certaines stimulations tactiles, olfactives ou même auditives peuvent provoquer une augmentation de la salivation : un bouchon de Champagne qui saute, par exemple, ou (moins agréable) un dentiste qui trifouille dans votre bouche… ( ce qui explique également le tube que le même dentiste met dans votre bouche).

Mais notre salive ne contient pas que de l’eau. Il y a aussi toute une série de protéines, dont des mucines qui contiennent beaucoup d’hydrates de carbone et qui jouent un rôle essentiel de lubrifiant. Cela facilite l’acte de parler ou de mastiquer tout en nous protégeant contre des microbes en lavant les parois internes de notre bouche. La salive contient également du calcium et des ions de phosphate, et une série d’autres protéines. Sa composition complexe, qui permet l’incorporation d’une certaine quantité d’eau sans diminution de ses capacités lubrifiantes, agit aussi comme barrière contre des modifications du pH dans la bouche : par exemple, celles causées par des substances acides comme le vin.

Mais ce sont certaines protéines, riches en prolines, qui ont la faculté de se lier avec les tannins de vins rouges. Voici une autre substance qui nous intéresse particulièrement.  Les tannins ont été développés par certaines plantes comme mécanisme de défense, à la fois contre des microbes et contre des prédateurs qui les consomment. Rendre son goût désagréable, amer et dur, est un excellent moyen d’éviter de se faire manger. L’« intelligence » de beaucoup de plantes a été de rendre comestible la seule partie utile à sa survie, c’est-à-dire le fruit, afin de provoquer la dispersion des pépins. Et le raisin ne devient agréable à manger que quand ses pépins arrivent à maturité, que l’acidité a donc baissé, le sucre augmenté, et que les tannins sont devenus plus souples.

Les tannins

Je vous ai parlé de la composition de la salive et de son rôle de lubrifiant, mais aussi un peu des tannins. Un des phénomènes qui démontrent  clairement l’importance de la salive dans la dégustation est la manière dont ces deux substances peuvent se combiner, plus ou moins efficacement, lors de la dégustation d’un vin rouge.

L’astringence des tannins est clairement perceptible sur les parois internes de la bouche, et sur la langue. La sensation provoquée par les tannins est celle d’une tension plus ou moins rugueuse. On dit, par exemple, que le vin « râpe» un peu. Mais si vous salivez beaucoup, cette sensation va diminuer, voir disparaître. Les professionnels qui dégustent beaucoup de vins rouges dans une seule séance connaissent très bien ce phénomène, car, après avoir dégusté en peu de temps une dizaine de vins rouges jeunes (donc souvent tanniques, comme des Bordeaux, par exemple), le cumul des tannins provoque un asséchement de la bouche et les derniers vins semblent plus durs que les premiers. Il suffit alors de faire une pause afin de régénérer sa salive et de re-déguster les mêmes vins dans l’ordre inverse pour s’apercevoir que ceux que l’on pensait être les plus tanniques ne le sont peut-être pas.

Qu’est-ce qui se passe ici ? Les tannins réduisent progressivement l’efficacité des mucines dans la salive en tant que lubrifiant. Ces tannins deviennent donc de plus en plus perceptibles jusqu’au moment où ils paraissent astringents, puis durs et agressifs. Et, effectivement, ils sont en train d’irriter les muqueuses qui ne sont plus protégées par la salive. En plus, quand les molécules des tannins sont suffisamment petites pour être captées par les récepteurs d’amertume sur la langue, cette sensation d’âpreté est accompagnée du goût de l’amertume. Avec des molécules plus grandes, l’amertume est moins perceptible. L’astringence, qui n’est pas la même chose que l’amertume mais qui lui est souvent associée, est moins perceptible lorsqu’un vin contient des sucres (polysaccharides). L’alcool peut aussi jouer ce rôle d’adoucisseur de l’impact des tannins. C’est pourquoi les vins de Châteauneuf du Pape, par exemple, paraissent généralement moins tanniques que les vins de Bordeaux, même si, à l’analyse, leur indice en tannins est aussi élevé. Les tannins semblent plus astringents quand le pH du vin est plus faible, c’est à dire quand l’acidité est plus forte.

La salive est largement capable de maintenir son efficacité dans la plupart des situations « normales » pour un amateur de vin. C’est lors des dégustations prolongées avec beaucoup de vins d’un même type que le problème devient réel. Donc cela concerne essentiellement des dégustateurs professionnels. Mais il est bon de comprendre ce mécanisme car, en cas de baisse de salivation, tout le monde peut être confronté à des sensations différentes et plus dures données par un vin qui, à une autre occasion, vous paraissait très agréable et pas du tout agressif.

Pour des vins en général, et des vins fins en particulier, de petits écarts de perception peuvent faire toute la différence entre une excellente, une bonne ou une médiocre impression de la qualité du vin en question. Et il ne faut pas oublier non plus ce point essentiel qui était au début de mon premier sujet sur la salive : le fait que chaque individu est différent dans tous les détails de son corps et que, par conséquent, la production de salive varie d’un individu à un autre. Cela concerne aussi bien le volume que la vitesse de production de salive qui va varier d’un individu à un autre en fonction de notre hydratation, du moment de la journée, de notre état émotionnel, et, éventuellement, de la prise de médicaments.

Quelque part, notre salive conditionne assez fortement notre goût, et c’est une des raisons pour lesquelles, quand on parle d’un vin, on parle beaucoup de notre propre état. Le goût d’un vin n’existe jamais dans l’absolu, mais toujours en lien avec le goût d’un individu.

La « minéralité » dans le goût d’un vin

Personne ne sait très bien ce que ce mot signifie, mais il est de plus en plus employé pour décrire un vin. Il a fait son apparition il y a une dizaine d’années pour devenir incontournable si ce n’est systématique.C’est un mot ombrelle très pratique pour décrire des sensations difficiles à formuler autrement, qu’il m’arrive parfois d’utiliser pour certains vins au goût un peu « métallique » ou qui évoquent vaguement la pierre. Il me semble que ces sensations sont très souvent dues à l’acidité relativement volatile, ou plutôt à l’équilibre acidité/matière sèche dans un vin. Parfois une légère sensation de salinité peut aussi justifier ce descriptif, même si la salinité en question est souvent illusoire, comme dans l’eau.

Dans le dernier numéro de Drinks Business, Sally Easton (Master of Wine) rapporte les conclusions de chercheurs qui estiment qu’une sensation perçue en dégustation comme étant « minérale » ne peut pas venir directement de minéraux contenus dans le sol, mais plutôt de thiols ou d’esters. Le professeur Alex Maltman, de l’Institute of Geography and Earth Sciences de l’University of Wales, considère non seulement que les résidus minéraux d’un vin sont minimes mais, surtout, qu’ils sont dépourvus de toute saveur. Il explique que la concentration de potassium n’excède que rarement quelques centaines de parts par million (ppm), celle de calcium ou de magnésium quelques dizaines de ppm. Non seulement ces substances n’ont pas de goût, mais leurs niveaux de concentration dans un vin sont inférieurs aux seuils de perception mesurés dans une solution aqueuse (et le vin a quand même plus de goût que l’eau…).

Alors d’où vient cette sensation que nous tentons de qualifier, un peu vainement, de « minérale » ? Selon Maltman, il est possible qu’elle soit provoquée par des esters qui sont formés par une réaction entre l’alcool et un acide organique. Ces esters sont hautement volatiles et nous sommes capables de les détecter à des niveaux infimes : quelques parts par trillion. Le professeur Wendy Parr, scientifique sensorielle qui travaille en Nouvelle Zélande, estime que la minéralité du sauvignon blanc (pas trop dur à trouver au pays des Kiwis) est liée à des thiols. Bref, pour les scientifiques, l’hypothèse d’un transfert d’un caractère minéral propre aux sols dans un vin n’est pas une piste sérieuse.

Peut-on décrire un vin par des mots ?

Nous autres, journalistes et écrivains du vin, devons régulièrement essayer de traduire en mots des sensations physiques (et parfois psychologiques) ressenties à la dégustation d’un vin. Cela fait 30 ans que j’essaie de faire cela et, très honnêtement, je trouve que l’exercice est assez vain et j’ai même de plus en plus de mal à le faire. C’est comme si l’expérience acquise ne me servait qu’à me rendre compte du peu que je sais.Pourquoi ? Parce que l’on se répète, on dit des banalités, et on utilise parfois un langage codifié qui doit paraître prétentieux et vide de sens pour la plupart des consommateurs. Apparemment je ne suis pas le seul à ressentir cela, ni à éprouver un certain embarras devant certains mots ou phrases lus ou entendus pour décrire des vins. Expliquer le vin par son histoire, son lieu de production, par ceux et celles qui les font, je le peux mais décrire avec précision des odeurs, saveurs et textures d’un vin d’une manière accessible et parlante pour les autres est vraiment très difficile, et peut-être même impossible.

Il existe des styles dans ce genre d’exercices, ou des écoles si vous préférez. L’école « salade de fruits », par exemple, qui met l’accent sur la description des arômes, l’école « tactile », qui insiste davantage sur la texture (qui est tout de même largement aussi importante que les odeurs, très variables selon la température et même la forme du verre), il existe aussi les techniciens ou les poètes qui pensent d’abord à se faire plaisir en perdant de vue la finalité de l’exercice qui est de rendre concrète et intelligible aux autres une expérience personnelle. Bref, rien de très satisfaisant.

J’ai été conforté dans mes doutes par un récent article paru dans The Telegraph qui évoque un sondage commandé récemment par le plus important marchand de vins en ligne en Grande Bretagne, Laithwaites. Ce sondage, effectué auprès de 1 000 consommateurs, nous indique que 55% des sondés « trouvaient inutiles les qualificatifs fréquemment utilisés pour décrire les vins. La plupart des termes utilisés ne permettaient pas aux consommateurs de comprendre le goût du vin. ». Deux tiers d’entre eux considéraient que les descriptions mentionnées sur les étiquettes ne correspondaient pas à ce qu’ils ressentaient eux-mêmes en ouvrant la bouteille. On peut répondre à cela que ce type de description sert d’abord à faire vendre. Plus grave pour nous, les critiques du vin, seules 9% des personnes interrogées ont affirmé consulter les critiques spécialisées avant de choisir un vin.

Si certains mots étaient jugés utiles pour orienter leur choix – il en est ainsi par exemple pour « frais », « vif » ou « goût de pêche » – d’autres, comme « pierre humide » ou « squelette ferme », étaient considérés comme prétentieux, sans signification et sans aucun rapport avec le goût du vin. Six personnes sur dix ont affirmé que le meilleur moyen d’appréhender le style et le goût du vin était de faire ressortir un goût de fruit prononcé. Près de la moitié des sondés ont considéré que les descriptions seraient plus efficaces si des mots du quotidien et modernes étaient privilégiés. La demande d’accords mets-vins est également une demande forte.

Même si la majorité est parfois courte dans ce sondage, je crois qu’il y a une leçon ici pour nous, journalistes ou sommeliers. Il faut être modestes, utiliser des termes faciles à comprendre et ne jamais oublier que la perception d’un vin est une expérience personnelle qui parle autant du goûteur que du vin en lui-même. Un bon critique d’art n’essaie pas de décrire un tableau, il donne des éléments d’explication sur le contexte, le peintre, le sujet, etc. Faisons de même avec le vin et soyons simples.

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