Les vins de Dalmatie, le paradis Croate (1/2)
Mer d’un bleu azur, côtes escarpées parsemées de quelques petites plages, pins d’un vert vif qui penchent pour vous faire de l’ombre, rochers et falaises rose-blanc-crème-gris, terre rouge, vignes et oliviers, villages et villes en calcaire blanc bâtis avec le goût et la rigueur d’une autre époque, le tout disséminé sur une longue côte qui comporte une série d’îles et presqu’îles qui donnent le tournis aux routes, comme aux ferries. Où suis-je ? Au paradis, peut-être ? Certains le diraient, et je ne suis pas loin de le penser aussi, par moments. Mais le paradis n’existe pas pour moi. En attendant, la côte de la Dalmatie, en Croatie, en fait un substitut fort acceptable au mois de septembre.L’ambiance de cette côte dalmate me fait souvent penser à l’Italie en face, peut-être en moins voyant et vulgaire. Ses habitants sont accueillants et charmants, mais semblent bien plus sincères. Sa tradition vinicole raconte sa propre histoire, clairement très ancienne, mais en voie de redécouverte. Des Dalmates ont été des pionniers de la viticulture en Nouvelle-Zélande. Nous savons maintenant que le zinfandel, devenu célèbre en Californie, a ses origines ici. Il s’appelle localement crljenak. Oui, je sais, c’est dur à prononcer sans un cours particulier. Il n’en reste que très peu en Dalmatie, mais son descendant a le vent en poupe, actuellement.
Le plavac mali est un cépage à fort caractère. Ses petites baies foncées sont très tanniques et assez riches en sucre. Elles sont capables de produire, selon les sites viticoles et les méthodes de production, des vins qui peuvent escalader du gentiment fruité au sérieusement structuré, avec des degrés de finesse et de plénitude variables. C’est la variété rouge qui domine les vignobles de cette côte. Les meilleurs que j’ai pu déguster, issus des îles de Korcula, de Hvar ou de Brac, ou de la presqu’île de Peljesac, viennent généralement de sites très pentus, qui plongent vers la mer face au Sud ou au Sud-Ouest. Ces sites sont reconnus localement et effacent le nom du cépage sur l’étiquette, comme cela arrive souvent en Bourgogne ou au Piémont. On a donc un système de crus, heureusement non encore formalisé dans une hiérarchie forcément arbitraire. Mais la reconnaissance de la valeur de sites remarquables, qui marquent les vins autant que la variété de vigne, est réelle.
Les dégustations que j’ai pu faire ont été sériées selon les régions d’origine des vins. Voici quelques vins que j’ai aimés et qui proviennent de l’île de Korcula et de la presqu’île de Peljesac.
La bouteille avec l’étiquette blanche et bleue sur la photo ci-dessus, appelée Bura, du nom de la famille productrice, est un bon exemple d’un Plavac Mali « entrée de gamme », simple, souple, fruité et alerte par ses saveurs. Un délice de vin jeune facile à boire. Les deux bouteilles à droite sont d’un tout autre tonneau. Elles proviennent toutes les deux de sites spécifiques qui font face à la mer. Le vin appelé Mare Postup (deuxième à partir de la droite) vient d’une parcelle, Postup, dont la pente est autour des 50%. Son fruit est aussi dense que raffiné. C’est un vin intense, très juteux et riche, avec une matière superbe et un très bel équilibre qui tend vers le velouté. Les tannins sont totalement enrobés. Son voisin de droite sur la photo provient d’une autre parcelle, Dingac, et forme un contrepoint intéressant, car il paraît plus sec et structuré. Dans sa tonalité plus austère, il est tout aussi beau et s’est révélé dans son élément avec une viande rouge grillée. Un autre grand vin. Il est aussi à noter que ces deux vins sont l’oeuvre d’une fratrie : Marija Mrgudic et Niko Bura. Enfin, j’ai totalement adoré un vin de dessert fait par un autre vigneron du secteur avec cette variété, mais pas encore commercialisé. Il m’a semblé que ce vin, aussi riche que parfaitement harmonieux, traduit toute la qualité que j’ai trouvée dans les raisins mûrs du plavac mali.
Suite : Découvrez les vins de Brac et Hvar
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